1. La fraternité, parent pauvre de la pensée politique martiniquaise
Le 17 décembre 2001, Aimé CESAIRE plantait avec Bernard HAYOT un courbaril à l’Habitation Clément.
Onze ans après cet acte symbolisant la fraternité, la question du vivre ensemble en Martinique suscite peu d’intérêt et de réflexion des hommes et des femmes politiques aux commandes des mairies, du Conseil Général et du Conseil Régional de Martinique.
Cette question du vivre ensemble est délaissée par tous les partis politiques qui délèguent à une association, « Tous Créoles », le soin d’occuper l’espace public et médiatique pour y promouvoir sa vision de la fraternité et du vivre ensemble en Martinique.
Cette situation est surprenante car les organisations politiques qui agissent pour le bien commun de la Martinique pourraient se soucier de favoriser la cohésion sociale. A fortiori quand ces organisations politiques ont pour objectif de créer une nation ou un pays (MIM, PPM, RDM, Bâtir le Pays Martinique).
Comment vouloir créer une société martiniquaise plus solide, plus humaine, plus fraternelle et ignorer les antagonismes persistants entre la communauté békée et le reste de la société martiniquaise ?
2. Les initiatives des békés en matière de fraternité
La reconnaissance de ces antagonismes et la prise de conscience de la nécessité de les dépasser ont amené les békés à prendre 2 initiatives en 2001 et en 2006.
Le 17 décembre 2001, Aimé CESAIRE plante un courbaril à l’habitation Clément avec Bernard HAYOT.
Le 21 mai 2006, Roger De JAHAM et une cinquantaine de descendants de colons assistent aux cérémonies célébrant l’abolition de l’esclavage sur la place de l’Abbé Grégoire à Fort-de-France.
La lecture, sûrement incomplète, que j’ai de ces initiatives est qu’elles ont toutes deux été impulsées par des membres de la communauté békée (Roger De JAHAM et Bernard HAYOT).
A ma connaissance, aucun leader politique de Martinique n’a jamais pris de réelle initiative publique pour promouvoir la fraternité entre les hommes et les femmes qui vivent en Martinique.
L’histoire retiendra peut-être qu’au début du 21ème siècle, ce sont les membres de la communauté békée qui ont fait la promotion de la fraternité en Martinique.
3. Quelques pistes de réflexion pour promouvoir la fraternité en Martinique
Afin de contribuer à la promotion de la fraternité dans l’espace public martiniquais, voici mes premières propositions :
1. Je propose que soit institué un jour de la fraternité martiniquaise célébré particulièrement dans tous les établissements scolaires de l’île. Pourquoi pas le 17 décembre ?
2. J’invite tous les jeunes hommes et toutes les jeunes femmes de la communauté békée à « franchir le pas » des unions mixtes, à suivre l’exemple d’Audrey De Jaham (fille de Roger De JAHAM qui s’est mariée à un Martiniquais n’appartenant pas à la communauté békée) et je les encourage à appliquer les conseils de Roger De Jaham qui « milite depuis longtemps pour la multiplication de ces alliances qui vont transfigurer notre pays » http://www.touscreoles.fr/2009/12/16/mariage-d-audrey-de-jaham-et-david-erepmoc/ ;
3. J’appelle chacun de nous, Martiniquais, à aborder cette question de la fraternité sans haine, sans agressivité, avec respect de l’autre, empathie et confiance;
4. Je suggère à tous les responsables politiques de prendre, eux aussi, des initiatives en matière de fraternité, s’ils accordent de l’importance à cette valeur. Je leur demande d’exprimer de façon plus audible leur engagement en faveur de la fraternité dans leur discours, dans leurs programmes politiques et de mettre cet engagement en œuvre dans la gestion quotidienne des institutions dont ils ont la charge.
En rédigeant ce texte, j’ai souhaité apporter une contribution à l’édification d’une communauté martiniquaise fraternelle et solidaire.
Une contribution qui, je l’espère, en appellera d’autres, privées ou institutionnelles.
Et, sur ce chemin difficile et douloureux, je demeure optimiste à l’invitation d’Aimé Césaire :
« (…) Mais pourquoi être pessimiste ?
Le courbaril est là pour nous l’interdire.
Avec ses feuilles. Non. Avec sa feuille, une feuille double et pourtant une.
Regardez-la.
Ici la bi-foliation se fait intime et partenariale.
Une particularité botanique sans doute, mais dans laquelle je me permettrai de voir un symbole.
Le symbole de la solidarité indispensable à notre peuple, en cette époque de survie. »
Schoelcher, le 16 décembre 2012
Olivier Ernest JEAN-MARIE
Citoyen martiniquais